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Licenciement pour motif grave

Notion de motif grave

Est considéré comme motif grave, toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur.

La définition du motif grave ne diffère donc pas de celle visée à l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail. Par contre, la procédure attachée à un licenciement de cette nature est sensiblement différente.

Ainsi, le licenciement pour motif grave sans que celui-ci ait été admis préalablement par la juridiction du travail est irrégulier et donne lieu au paiement d’indemnités de protection (voir ci-après). L’employeur ne peut licencier avant que la procédure soit entièrement terminée.

Tous les manquements graves ayant pour conséquence la disparition immédiate et définitive de la confiance entre l’employeur et le travailleur pourront donner lieu au respect de la procédure visant à lever la protection pour motif grave.  La loi précise toutefois que les faits invoqués ne peuvent être liés à l’exercice du mandat du délégué du personnel.

Procédure spéciale de licenciement

Lorsque l’employeur veut licencier un travailleur protégé pour motif grave, il y a lieu de suivre la procédure suivante :

A. Information du travailleur, de l’organisation représentative et saisine du président du tribunal du travail

L’employeur qui envisage de licencier un travailleur protégé pour motif grave informe, par lettre recommandée, le travailleur et l’organisation interprofessionnelle qui a présenté sa candidature de son intention de le licencier pour motif grave. Il doit, dans ces lettres, faire mention en détails de tous les faits dont il estime qu’ils rendraient toute collaboration professionnelle définitivement impossible.
L’envoi de ces lettres doit avoir lieu dans les trois jours ouvrables qui suivent le jour où l’employeur a connaissance des faits qui constituent le motif grave.

Dans le même délai, il saisit, par requête, le président du tribunal du travail territorialement compétent.
La requête, adressée au greffe par lettre recommandée à la poste, doit mentionner :

  • l’indication des jour, mois et an ;
  • les nom, prénom, domicile du requérant ainsi que, le cas échéant, ses qualités et inscription au registre de commerce ou au registre de l’artisanat ou, s’il s’agit d’une personne morale, l’indication de sa dénomination, de sa nature juridique et de son siège social ;
  • les nom, prénom, domicile et qualité de la personne à convoquer ;
  • la signature du requérant ou de son avocat.

A cette requête est jointe une copie des lettres adressées au travailleur et à l’organisation. 

B. Période de négociation et comparution devant le président du tribunal du travail

Une période de négociation de 5 jours ouvrables débute le 3ème jour ouvrable qui suit le jour de l’envoi des lettres recommandées par l’employeur au travailleur protégé et à l’organisation syndicale.

Le travailleur et l’organisation prennent contact avec l’employeur pour faire valoir leur point de vue sur les faits invoqués.

Durant ce délai, les parties sont convoquées par le greffier du tribunal du travail pour comparaître séparément et personnellement devant le président du tribunal du travail.  Les parties peuvent donc être assistées par leur avocat mais elles ne peuvent pas être représentées par lui. 
Au cours de cette comparution, elles seront informées de la portée de la procédure à suivre.

C. Tentative de conciliation – deuxième comparution devant le tribunal du travail

Au cours de la comparution précitée, le président du tribunal du travail fixe également une nouvelle audience, se situant immédiatement à l’issue de la période de négociation, au cours de laquelle il tente de concilier les parties. En cas de conciliation, cet accord est acté par le président dans un procès-verbal qui est revêtu de la formule exécutoire.  L’accord acquiert ainsi la force obligatoire d’un jugement.

A défaut de conciliation, le président du tribunal du travail en fait mention dans l’ordonnance qu’il rend le même jour. Dans cette ordonnance, il se prononce également sur la poursuite ou la suspension, pendant la procédure de reconnaissance du motif grave, de l’exécution du contrat de travail du délégué du personnel effectif ou suppléant. 

La suspension du contrat de travail implique aussi la suspension de l’exercice du mandat du délégué.  Cette décision est notifiée aux parties, par pli judiciaire, au plus tard le 3ème jour ouvrable suivant le prononcé.  La suspension du contrat prend effet à la date de la saisine, par citation, du président du tribunal du travail (voir ci-après).

D. Phase contentieuse (introduction de la procédure judiciaire proprement dite)

Saisine dans les formes du référé, du président du tribunal du travail par voie de citation.

Si, au terme de la période de négociation de 5 jours ouvrables, l’employeur maintient sa décision de licencier le (candidat) délégué du personnel, il doit faire reconnaître le motif grave par le tribunal du travail.

A cette fin, il saisit, par citation et dans les formes du référé, le président du tribunal du travail.

Le délai pour effectuer cette citation diffère selon que le travailleur est candidat non élu ou délégué effectif/suppléant.

  • s’il s’agit d’un candidat non élu, la saisine doit avoir lieu dans un délai de 3 jours ouvrables suivant l’échéance de la période de négociation ;
  • s’il s’agit d’un délégué du personnel, le délai de 3 jours ouvrables suivant le jour où l’ordonnance de suspension du contrat de travail est rendue par le président du tribunal (et non réceptionnée par l’employeur).

La citation mentionne le motif grave à l’origine de la demande. Les faits invoqués ne peuvent être différents de ceux notifiés dans les courriers recommandés adressés au travailleur et à l’organisation en début de procédure. Aucun autre motif ne pourra, dans la suite de la procédure, être soumis à la juridiction du travail. Par ailleurs, à la citation est jointe la copie des lettres recommandées adressées au travailleur et à l’organisation.

Lors de l’audience introductive qui s’en suivra, le président tentera une dernière fois de concilier les parties.  A défaut d’y parvenir, il prend, le jour de cette audience introductive, une ordonnance qui fait état de l’absence de conciliation et détermine la chambre du tribunal du travail qui devra plaider l’affaire. Cette ordonnance sera notifiée aux parties au plus tard le 3ème jour ouvrable suivant le prononcé.

L’audience du tribunal au cours de laquelle l’affaire sera plaidée doit avoir lieu, en principe, dans un délai de 30 jours ouvrables suivant celui du prononcé.  Le président peut porter ce délai à 45 jours ouvrables en cas d’accord des parties.

Ce délai ne porte pas atteinte au principe selon lequel le pénal tient le civil en état. Autrement dit, si le fait qui constitue le motif grave fait l’objet de poursuite devant le tribunal pénal, le tribunal du travail devra attendre l’issue de la procédure pénale avant de statuer sur le caractère grave ou non du motif invoqué.  Cela peut avoir pour conséquence que les délais du référé ne soient pas respectés.

Le président détermine le délai dans lesquels les pièces et les conclusions doivent être déposées. Ce délai n’est susceptible ni d’appel, ni d’opposition. 
Ces décisions sont notifiées aux parties au plus tard le 3ème jour ouvrable suivant le prononcé.

Il appartient à l’employeur de conclure le premier.

Le tribunal ne pourra accorder au maximum qu’une seule remise d’audience et ce, sur base d’une demande motivée.  Cette remise ne pourra en tout cas de cause dépasser 8 jours.

Si les parties le souhaitent, elles peuvent, par voie de conclusions, demander une enquête.  Celle-ci devra être réalisée dans le délai déterminé par le juge.  La demande doit mentionner les noms, prénoms et domicile (ou lieu de travail) des témoins à auditionner.

Le tribunal peut également décider d’autres mesures d’instruction dont il fixera les délais.

Ces délais ne sont pas susceptibles d’appel.

Le juge statue dans les 8 jours suivant la clôture des débats (le délai est porté à 13 jours si le ministère public prend la cause en communication).

Tous les jugements sont communiqués aux parties, par pli judiciaire, au plus tard le 3ème jour ouvrable suivant son prononcé.  Ils ne sont pas susceptibles d’opposition.  Quant à l’appel, seul le jugement définitif est susceptible d’appel.

L’appel

Il peut être interjeté appel, par voie de requête, contre le jugement définitif du tribunal du travail dans un délai de 10 jours ouvrables suivant la date de la notification du jugement par le greffe – c’est-à-dire à dater de l’envoi par le greffe et non pas à dater de la réception de l’envoi par les parties.   La requête est introduite par lettre recommandée à la poste et est envoyée par le greffe à toutes les parties.  La requête contient l’exposé des moyens de l’appel.  Seuls les moyens formulés dans la requête sont valables. 

Le dossier complet de l’appelant doit être déposé au greffe dans un délai de 3 jours ouvrables suivant l’envoi de la requête.

La procédure d’appel est similaire à celle en vigueur devant le tribunal du travail sauf en ce qui concerne la conciliation qui, au stade de l’appel, n’a plus lieu.

Situation du travailleur pendant la procédure

Pour les membres effectifs et suppléants, le président du tribunal du travail devra décider de leur maintien ou non au travail pendant la procédure judiciaire. S’il décide de la suspension de l’exécution du contrat de travail, l’exercice du mandat sera automatiquement suspendu. La suspension doit rester exceptionnelle. Pour les candidats non élus, la décision de suspension de l’exécution du contrat de travail est prise par l’employeur lui-même.

En cas de suspension de l’exécution du contrat de travail du représentant du personnel - décidée par le tribunal du travail - ou en cas de suspension de l’exécution du contrat de travail du candidat non élu - décidée par l’employeur-, celui-ci est tenu de payer une indemnité complémentaire aux allocations de chômage à l’échéance de chaque période de paie.  Le montant de cette indemnité sera égal à la différence entre les allocations de chômage et la rémunération nette de référence afin d’assurer au délégué du personnel ou au candidat délégué du personnel un revenu égal à sa rémunération nette.  Les modalités de calcul de cette indemnité sont prévues par l’arrêté royal du 21 mai 1991 (MB : 28 mai 1991).
Cette indemnité restera acquise au travailleur quelle que soit la décision du tribunal du travail quant à l’existence d’un motif grave.

Si l’exécution du contrat de travail est suspendue, le travailleur peut, pendant la durée de la procédure de reconnaissance pour motif grave, mettre fin au contrat sans préavis ni indemnité.

Si l’exécution du contrat de travail n’est pas suspendue, le travailleur qui veut mettre fin au contrat devra respecter le délai de préavis légal. Si le travailleur a un statut d’employé, il pourra faire application des délais de préavis réduits tels que définis en cas de contre-préavis, soit un, deux ou quatre mois maximum selon le montant de la rémunération.

Le licenciement

Lorsque le tribunal ou la cour du travail reconnaît le motif grave, le délai de trois jours ouvrables prévu à l’article 35, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail court à partir du troisième jour ouvrable qui suit l’échéance du délai d’appel ou, si appel a été interjeté, du troisième jour ouvrable qui suit la notification de l’arrêt.